"La voix dans le paysage"

Mise en espace de Roger Lombardot

Résidence, en bord de mer... juin 2016

Invité par Gilles Desnots – Liber-Libra - 

  Roger Lombardot part en résidence d'écriture, à la mer...

 

Danielle Vioux, auteure, EAT, Théâtre des 1001 Portes (13)
Roger Lombardot, auteur, EAT, Théâtre d’Aujourd’hui (07)
auteurs des EAT Méditerranée
invités par Liber-Libra en résidence d’écriture du 5 au 11 juin 2016

 Écouter l'émission de présentation : "le bruit des planches" 

Roger Lombardot est parti en résidence, en bord de mer... méditerranée, chez Gilles Desnots et Albertine Benedetto à Hyères...

Résidence d'une semaine d'écriture avec Danielle Vioux, auteure elle aussi.

Ils ont restitué leur travail sur deux soirées, sur la plage, dans un endroit secret et mystérieux.

Roger Lombardot a écrit "Initiation" ou "Tautira"

 

 

 

 

 

 

 

 

  

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

  

 

 

  

Extrait :

"On venait d’arriver à Tautira, une heure de route depuis Papeete. On logeait dans un faré, la maison typique de là-bas, avec vue sur le lagon et sur la montagne. Un décor de rêve. Sauf que c’était la réalité. « Le jardin d’Eden » avait dit Stevenson quand il y avait jeté l’ancre, en 1888. 

- Je crois que je ne vais pas bouger de là. C’est tellement extraordinaire cet endroit. Je passerai mes journées à lire sur la plage ou alors j’irai marcher dans la montagne. Tu ne me verras pas. Je te laisserai écrire tranquille.

Je ne l’ai pas vue beaucoup en effet. Cependant, chaque soir, elle me racontait sa journée et moi je lui lisais ce que j’avais écrit.

-  J’ai envie de me rendre à Papeete, me dit-elle un jour. Pour le plaisir de faire le marché. Et pour me balader en ville aussi, retrouver les lieux qui nous sont familiers. Tu m’accompagnes ?

-  Ne me tente pas, s’il te plaît. J’angoisse déjà à l’idée de ne pouvoir terminer mon travail. C’est stimulant les résidences, l’obligation d’écrire dans un temps donné, à marche forcée, mais tu n’imagines pas à quel point c’est stressant.  

-  Dommage ! On aurait pu dîner aux roulottes, manger un chao men. Là, elle exagérait. Carrément... Manger un chao men chez Mamy... Combien de fois en ai-je rêvé, à la suite de la précédente tournée. Retrouver l’ambiance du port de Papeete, la nuit... les dizaines de roulottes rassemblées le long de la jetée. Une curiosité unique, ces roulottes ! Un trésor patrimonial... Imaginez trente ou quarante camions restaurant arrivant chaque soir depuis les années vingt du siècle dernier sur le port de Papeete.

- Désolé ! Pas pour moi cette année.

Elle est rentrée tard. Faire Papeete Tautira demeure une aventure. Surtout ne jamais prendre le dernier bus. Qu’il tombe en panne, comme c’est arrivé ce jour-là, et on est bon pour finir à pied. Heureusement, elle a trouvé du secours à Taravao : un infirmier qui rentrait à la maison après sa journée de travail. 

- Je ne vais pas me plaindre, j’ai voyagé en truck, me dit-elle.

Ah ! le truck... un drôle d’engin, celui-là : une caisse en bois percée de baies sans vitres, tirée par un camion hors d’âge. Un véhicule obsolète au charme suranné, lui aussi emblématique de l’île. Bientôt, il aura disparu et c’est tout un pan de l’histoire de Tahiti qui s’enfoncera dans le passé. 

 -  Demain, on est invités à un spectacle de danse, me lance-t-elle joyeusement. 

-  Ah, oui !... Et à qui doit-on cette invitation? 

-  Un admirateur. 

-  De toi ou de moi ? 

-  Devine !  

-  Il a vu ma photo dans La Dépêche de Tahiti, c’est ça ? 

-  Non ! il a flashé sur mes jambes. "  

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• Roger Lombardot, extrait de Tautira, juin 2016